Le Greffier Noir, enquêtes et faits divers.

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Manuel Pardo, le vrai/faux Dexter

Par Virginie Ikky,

 

 

 Le 31 décembre 2013

 

 

 

dexterMardi 11 décembre 2012, vingt-quatre ans après avoir exhorté le jury à lui accorder une «glorieuse mort », le tueur en série de Miami Manuel Pardo a été exécuté par injection létale. Ces dernières paroles furent un hommage à l'armée «  Airborne forever », ainsi qu'une pensée pour sa fille « I love you Michi baby ». Il fut déclaré mort à 19 heures 47. Manuel Pardo a écrit une lettre avant sa mort dans laquelle il revendique le meurtre de 6 hommes, mais nie s'en être pris à des femmes.Tous furent assassinés au nom de sa croisade contre le trafic de stupéfiants.

 

Un policier à Miami qui assouvit ses envies de meurtre en sélectionnant des délinquants : le parallèle avec le héros de la série Dexter semble évident, bien que l'auteur des romans dont la série est adaptée nie farouchement s'être inspiré de Pardo. Et il est vrai que les personnages n'ont en définitive pas grand chose en commun à la lecture des méfaits de Pardo, qui était surtout un flic ripoux et accroc.

 

Ancien militaire de la Navy, Manuel Pardo avait 21 ans quand il intégra la police de la route de Floride en 1978. Loin d'être un policier au-dessus de tout soupçon comme ce cher Dexter, Pardo franchit la ligne rouge rapidement. Accusé de falsification de plus de 100 contraventions, il est autorisé à démissionner au lieu d'être congédié. Deux mois plus tard, il est embauché par le département de police de la ville de Sweetwater pour patrouiller dans la banlieue de Miami. Cette ville concentre une forte population issue du Nicaragua. En 1981, Pardo est mis en accusation par le Procureur général avec trois autres collègues pour une série de cas de brutalités policières. Ces accusations sont rejetées, mais Pardo est congédié le 21 Janvier 1985 après s'être rendu au Bahamas pour témoigner en faveur d'un policier impliqué de trafic de drogues. Sans travail, Pardo se recycle alors dans les stups et devient homme de main pour Ramon Alvero, alias « el negro ».

 

Le 22 Janvier 1986, Manuel Pardo et son comparse Rolando Garcia se rendent à la résidence de Mario Amador, soi-disant pour acheter deux kilos de cocaïne. Ils ont planifié d'assassiner Mario Amador et de lui voler la cocaïne. Ils arrivent donc à son domicile avec une mallette contenant un calibre 22. semi-automatique équipé d'un silencieux. Alors que Mario Amador s'affairait avec la cocaïne, Pardo lui tire dessus.

 

Le 28 Janvier 1986, Pardo et Garcia vont rencontrer Michael Millot, un armurier qui leur avait fourni plusieurs silencieux. Il semble que Pardo, après avoir appris que Millot était un informateur du gouvernement fédéral, ait commencé à s'inquiéter du fait que Millot pourrait lui tendre un piège. Pardo et Garcia attirent Millot dans le véhicule et Pardo lui tire une balle dans la tête. Ils se débarrasseront du corps dans un endroit isolé.


L'histoire se répète le 27 Février 1986, lorsque Pardo et Garcia sont envoyés par leur patron acheter trois kilos de cocaïne chez Luis Robledo. Après leur arrivée à l'appartement de Robledo, Pardo va dans la salle de bains, où il sort son calibre 22 toujours équipé d'un silencieux. Il tue ensuite Luis Robledo ainsi que son associé, Ulpiano Ledo.


Le 22 Avril 1986, Pardo et Garcia vont au domicile de Fara Quintero et Sara Musa. Pardo et Garcia ont été contrariés par les filles qui n'avaient pas réussi à acheter un magnétoscope avec la carte visa de Luis Robledo, comme Garcia leur avait ordonné. En outre, les filles se plaignaient continuellement de ce que Garcia devait la somme de 50 $ à Fara Quintero et avaient eu l'audace de le lui faire lourdement remarquer en public lors de soirées. Une fois dans l'appartement, Pardo, comme à son habitude, va dans la salle de bain. Quand il sort, il tire sur Sara Musa à de nombreuses reprises, mais son arme s'enraye. Il pointe ensuite le pistolet sur la tête de Fara Quintero puis tire sur elle à plusieurs reprises.


Le lendemain, le 23 Avril 1986, Pardo et Garcia retrouvent leur patron, Ramon Alvero, qui les évitait soigneusement après l'échec de deux transactions de cocaine sur lesquelles comptait Pardo. Alvero et sa petite amie Daisy Ricard sont conduits dans un endroit isolé et abattus. Le corps de Daisy échoue dans un terrain vague et celui d'Alvero est laissé dans le coffre de son véhicule. En tirant une balle dans la tête de Daisy, Pardo s'est blessé au pied et part après les crimes se soigner à New-York.


manuel pardoLe 7 mai 1986, Manuel Pardo et Roland Garcia sont arrêtés et mis en accusation pour les meurtres de Ramon Cruz Alvero et sa petite amie, Daisy Ricard. Ils ont été retrouvés car ils se servaient des cartes bancaires de leurs victimes. Le 11 Juin, la police de Miami annonce que Pardo et Garcia sont liés à un total de neuf meurtres, six hommes et trois femmes. Pardo a été confondu à cause de son journal où il parlait des meurtres ainsi que des coupures de presse saisies dans sa maison. Des objets nazis sont également récupérés chez Pardo qui est un fervent admirateur d'Adolf Hitler, et croit que les juifs et les noirs sont des espèces inférieures qui méritent l'extermination.

 

Pour sa défense, Pardo va s'ériger en nettoyeur de la rue, qui s'en prend aux parasites de la société, bien que son avocat ait lui plaidé l'aliénation mentale. Le Procureur soutiendra quant à lui que Pardo est un ex-flic qui a mal tourné, sur fond d'addiction à la cocaine. A son procès, Pardo va à la barre, malgré les réticences de son avocat, assume non seulement les meurtres mais déclare être déçu d'avoir tué si peu de ces parasites : "l enjoyed what I was doing. 1 enioyed shooting them.  They're parasites and they're leeches, and they have no right to be alive.  Somebody had to kill these people." "l sent their souls to the eternals fires of damnation of hell for the misery they caused." Il nia bien évidemment farouchement être un homme de main du narcotrafic.

 
manuel pardoSyvil Marquit, psychiatre citée par la défense, déclara que Pardo était aliéné à l'époque des neuf meurtres, et incapable de discerner le bien du mal. Leonard Haber, témoignant pour l'Etat, déclara lui que Pardo était sain d'esprit, mais mauvais. Manuel Pardo fit cette remarque au tribunal au sujet des experts: «Ils sont des putains. Payez les assez d'argent et ils vont dire n'importe quoi."

 

Le jury va délibérer pendant six heures, et le 15 avril 1988, le déclare coupable de neuf meurtres et autres actes délictueux. 5 jours plus tard, la Cour statue sur la peine. Pardo déclare au jury "Je suis un soldat, j'ai accompli ma mission et vous demande humblement de m'accorder la gloire d'en terminer avec mon existence et non de m'envoyer derrière des barreaux pour le restant de ma vie. Je vous supplie de m'autoriser à avoir une fin glorieuse. » Le jury a respecté cette volonté. Pardo est condamné à mort pour chacun de ses meurtres outre 15 ans de prison. La condamnation fut confirmée en appel.


En Mars 1996, le Miami Herald révéla que Pardo, désormais baptisé «Death Row Roméo ", avait publié des annonces dans les journaux pour attirer des femmes qui lui envoyaient de l'argent en échange de promesses d'amour. Le Herald rapporta que Manny avait déjà accumulé 3.530 dollars sur son compte cantine de la prison. L'annonce était ainsi rédigée :

 

« FLA. 116-156 CORRECTIONAL INSTITUTE INMATE.  Ex-cop Vietnam vet.  Took law into own hands and ended up on Death Row.  He needs letters from sensitive-understanding female, for real-honest relationship. »


Barbara Ford puis Betty Them furent deux des correspondantes et bienfaitrices les plus assidues. Pardo leur adressait des coupures de presse présentant sa carrière de policier sous un jour favorable et l'argent affluait. Il commit cependant l'impair d'adresser une lettre pour Barbara à Betty, qui furieuse, s'empressa de contacter elle-même l'autre femme.
Malgré les plaintes de Betty, jamais Pardo ne sera inquiété puisque n'ayant rien commis d'illégal.

 

 


 

Au final, après de nombreux recours, la sentence de Manuel Pardo fut mise à exécution, l'occasion de médiatiser son jumelage avec le personnage de roman et de série Dexter. Malgré quelques similitudes, il est bien difficile de reconnaître la psyché de Dexter chez Manuel Pardo. Stéphane Bourgoin a en revanche mis en évidence la ressemblance entre Manuel Pardo et le « bad guy » de la saison 3, Miguel Prado, un Procureur aux méthodes coups de poing, qui au prétexte de faire justice lui-même et d'aider Dexter à nettoyer Miami, finit par éliminer une maîtresse gênante. C'est effectivement certainement bien pour ce personnage que l'auteur Jeff Lindsay, qui a toujours vécu à Miami, a puisé dans le discours et les dérives meurtrières de Pardo, en modifiant à peine le nom de Manuel Pardo. L'auteur continue cependant de nier une quelconque inspiration.

 

Virginie IKKY pour Greffier Noir

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



31/12/2012
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